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Une activité salicole sur les rives de la Rance, du Frémur, et du Frémur d’Hénanbihen

Sur la Rance, des marais salants furent mis en place au XVIIIème siècle, sur l’idée du comte de la Garaye, qui fit venir des paludiers de Saillé et de Batz, dans la presqu’île guérandaise, pour les exploiter. Ces marais salants étaient installés sur les communes de Saint-Père-Marc-en-Poulet et de Saint-Suliac, dans l’anse de la Couaille, autour du moulin du Boschet. Ils constituent la porte d’entrée du littoral salicole créé entre l'estuaire de la Rance et l'embouchure de la Loire. La présence d’une activité salicole est également attestée sur le territoire sur les rives du Fréumur, et sur les celles du Frémur d’Hénanbihen.

Une activité de récolte du sel à Saint-Père-Marc-en-Poulet et à Saint-Suliac jusqu’en 1900

Sur 78 hectares, dix-huit salines et réservoirs furent établis, pensés en fonction de la topographie et de la géologie du site, ainsi que des conditions maritimes et climatologiques locales. Dans cet ensemble de bassins – vasières, cobiers et salines, creusés dans l’argile et limités par des digues et des talus –, les salines sont les unités les plus régulières : subdivisées en fards (bassins intermédiaires), adernes (bassins à saumure) et œillets, ponctuées par les ladures (zones de stockage temporaire), elles forment le cœur du dispositif. A proximité, les trémets, où les récoltes sont entreposées, forment en hiver des mulons caractéristiques, seul relief d’un paysage plat où l’eau de mer est retenue pour fournir le sel par l’action conjuguée du soleil et du vent. Des témoignages écrits sont parvenus jusqu’à nous. Ainsi, on sait qu’en 1833, « le marais salant est divisé en 18 salines qui sont distribuées entre 18 familles ; un homme, une femme et deux ou trois enfants suffisent pour faire valoir une saline ». En 1855, les statistiques industrielles font état de 1,72 hectares d’œillets en activité, pour une production annuelle d’environ 308 quitaux de sel, vendue 6,50 francs le quintal. En 1911, Armand Dagnet indique, à l’occasion d’une promenade sur les bords de Rance, qu’il a vu, « il y a une douzaine d’années, les deux derniers tas de sel recueillis dans ces marais, jusqu’à 3 ou 4 mètres cubes chacun ». Les archives donnent également des informations concernant cette activité de récolte du sel jusqu’en 1896, date à laquelle les 8 à 10 paludiers jusqu’alors recensés à Saint-Suliac disparaissent des listes nomitatives.

Dans certains cas, le sel consommé en pays de Rance était raffiné. En 1811, trois raffineries de sel sont recensées à Dinan. Dans la statistique des manufactures, on peut lire que « cette partie de l’industrie du pays est importante. C’est dans cette ville de Dinan que l’on fabrique le plus de sel et où il est à meilleur compte à cause du prix du bois ». Les établissements étaient situés sur la rive gauche du port de Dinan, entre le site de ce qui sera la future brasserie du Quai, en amont, et ceux du four à chaux de la Grande Vigne et du moulin  Tan de Beaudouin, en aval. La fabrication du sel et celle du tan furent concomitantes. Les trois établissements emploient 15 ouvriers qui habitent la ville ou les faubourgs et qui travaillent toute l’année à cette activité. La valeur brute des produits est de 90 000 francs. Le sel traité provient, outre de l’anse de la Couaille, du Croisic ou de Guérande, et arrive soit par voie d’eau, soit à dos d’homme ou de mulet. Un document indique, d’après les Anciens du pays, qu’au début du XIXème siècle des sauniers guérandais apportaient du sel à dos de mule dans les environs de Guitté, et au retour emportaient du sablon calcaire pour les forges de Paimpont. Le sel raffiné à Dinan est dit « de la plus belle qualité ». Par la suite, les archives ne font plus mention de cette activité à Dinan. Pourtant, le transport de sel continue. Le 31 juillet 1936, le navire « Le Puissant », venant de Saint-Suliac, chargé de sel, accoste à Dinan. Il revient le 25 septembre et le 11 octobre de la même année, avec le même chargement et provenant toujours de la même localité. D’autres bateaux, venus du Croisic, apportent régulièrement du sel à Dinan. A Saint-Servan, la seule raffinerie de sel dont les archives gardent une trace fut mise en place en 1837, rue Godard.

La saliculture également présente dans la vallée du Frémur

La découverte d'un four à sel sur l'île des Ebihens par les archéologues du Centre Archéologique Régional d'Aleth, prouve que l'exploitation du sel sur la côte de Poudouvre remonte à l'Antiquité. Les documents d'archives et la toponymie locale fournissent des traces de cette activité. L'exploitation des salines sur les bords du Frémur et du Drouët s'est poursuivie jusqu'à la fin du XVIIIème siècle. Seules deux salines restaient en activité en 1732 dans la vallée littorale du Frémur. Le rapport du chevalier de Mazin en 1756 relève en bordure des marais de Drouëts 13 salines, tant sur Ploubalay que sur Lancieux, dont les salines de la Roche. Cinq salines sont encore en activité en juin 1772 sur cet estuaire, d'après un document d'archives (AN Q 306). Celui-ci relate la demande de concession de François Joseph Recoursé pour un terrain situé entre la digue du marais de Pontbriand jusqu'à la mer (entre Lancieux et Saint-Briac-sur-Mer). On y trouve mention d'un projet d'assèchement des terres et de la construction d'une nouvelle digue à hauteur de Roche Goude (réalisée vers 1791). Une autre pièce d'archives, datée de 1766, fait état des salines en bordure du Frémur : la « Saline du Douëtel ». Un aveu de 1703 cite une saline située entre les villages du Douëtel et de l'Anerie, dite « saline Trouillon ». En 1732, cette saline est déclarée « tombée en ruines ». La construction de la digue de Rochegoude par le sieur Recoursé et de la digue des marais du Drouet devait mettre fin progressivement à l'activité salicole sur les bords du Frémur à partir de 1772, date à laquelle on ne dénombrait plus que 5 salines en activité. Sur les bords de la rivière du Drouet et de la Roche, il existait une trentaine de salines au XVIIIème  siècle, qui concernaient les paroisses de Trégon, Ploubalay et Lancieux. Les salines situées au Nord de la Saline de la Roche étaient exploitées par les métairies nobles de la Briantais et de Buglais, lesquelles versaient une rente annuelle de sel à l'Abbaye de St-Jacut-de-la-Mer. Les extraits du cadastre napoléonien de Lancieux permettent de situer ces parcelles et leur classement en catégorie : A : lieu d'extraction du sel ; B : lieu de rejet du sable lavé (Mondy, Mondet, Mondinet) ; C : zone d'exploitation du sel. Sur le cadastre napoléonien, on peut encore remarquer, sur les parcelles situées dans les marais du Drouet (près de la Roche), les parcelles numérotées B 251, B 260 à B 263, appelées « les Marais de la Roche » ; B 258, « la saline » ; B 259, « la Plate Grève ». Sur le Frémur, entre les villages de la Chambre et de la Ville Gatorge, on peut relever les parcelles G 891, G 893, G 894, appelées « les Sablonnettes » (A) et la parcelle G 896, nommée « le Mondy de la Saline » (B). Près du Doietelle, les parcelles G 935 à G 943, G 950 à G 954 représentent le « Marais de Roche Goude » (A), les parcelles G 835, G 836, G 848, « le Mondet » (B), la parcelle G 956, « Sous le Mondinet », la parcelle G 957, « le Mondet des Rivières » (B). Il faudrait encore citer pour compléter cet inventaire non exhaustif « la Lande Saulnier » à Lancieux.

Le Mondy de la Saline

A proximité de la saline, le saunier rejetait la sable lavé, qui d'accumulait, en créant des monticules au fil des années, c'est ce qu'on appelait le « mondy ». Le « Mondy de la Saline » est donc à interpréter comme une parcelle de terre autrefois réservée au rejet du sable lavé, à côté d'une zone d'exploitation (cadastre 1827, parcelle G 896). Le « mondain » ou « mondy », est selon le Littré de 1876 un monticule de sable ou tertres élevés en forme de tombeaux. D'après les recherches de l'abbé Auguste Lemasson, la saline de Lancieux, sur les rives du Frémur, dépendait au 1er  quart du XVIIIème  siècle, de la juridiction de Saint-Jacut-de-la-Mer. Elle comprenait : l'atelier du saunier, de 26 pieds de long, équipé de quatre poêles de plomb pour chauffer la saumure et fabriquer du sel, une grève et marais où l'on pouvait prendre le sable pour faire le sel et un « transport » pour le stockage du sable et la préparation de la saumure. Cette saline occupait une surface d'environ 75 ares. Elle était partagée entre deux héritiers, « pour en jouyr par moytié en communauté », comme le confirme le testament daté du 24 octobre 1627, de l'héritage de Ollivier Maraboeuf, au baillage de la Prévotais. La production du sel, estimée à 16 kg par an par habitant, était consommée sur place. Au XVIIIème siècle, La Prévostais en Lancieux en produisait annuellement 1, 5 tonnes, selon les recherches de Catherine Dressayre.

Des salines dans l'anse de St-Germain-de-la-Mer (Saint-Jacut-de-la-Mer)

Depuis le Moyen-âge, la baie de Saint-Jacut-de-la-Mer a été propice à la fabrication du sel ignigène par évaporation. En effet, la longueur de la baie de la Fresnaye permet une certaine évaporation avant le retour des vives eaux. La présence de bâtiments anciens aux noms évocateurs, situés aux limites de l'ancienne grève, permet de supposer l'existence des salines et d'un grenier à sel. La maison des Salines est une construction datée de la fin du XVIIème siècle ; l'édifice des Sablons est actuellement une ferme. Le Magasin à sel a été construit vers la fin du XVIème siècle, selon un modèle qu'on retrouve dans la région de Guérande, dont l'escalier extérieur présente une architecture identique aux escaliers dits vannetais. Ceci laisserait supposer des contacts avec les sites salins qui subsistent toujours en cette région. Il existe un stock de sable qui a été exploité pendant la première moitié du XXème siècle, un sable fin et coquillé, très estimé des maçons. Ce stock avait été étendu au XVIIIème siècle entre les Sablons et Corbusson pour former une digue permettant de prélever sur la mer les marais des Mottais. Cette digue était longue de 300 m et large de 20 à 25 m, selon la tradition orale, elle est évaluée d'une hauteur de 2,50 m. Ce sable étant situé à quelques 5 km du niveau zéro de la mer, il ne saurait s'agir d'une dune résultant des effets du vent, comme il en existe le long des plages. Il s'agit à l'évidence de sable résultant de sablon lavé pour la fabrication de sel. 

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